★ Sophie Cuvelier

Fille d'artistes, Sophie Cuvelier a grandi dans un environnement qui ne s'est jamais beaucoup préoccupé d'elle. 
C'est peut-être pour ça qu'elle est aussi perchée, comme une gamine en haut de son arbre. Elle maîtrise tous les codes autant qu'elle les dédaigne,et son regard va toujours se ficher au bien delà des réalités convenues, quelque part du côté de l'évidence. Styliste implacable, elle fait mouche à coup sûr. C'est une surdouée discrète qu'il serait vain d'essayer de comprendre. Elle-même s'y perd parfois. Elle ne doit alors son salut qu'à des plongées abyssales dans des gestes artistiques répétitifs qui confinent à l'obsession. Elle a l’œil, c'est tout. propos recueillis de Dann Chetrit

photo© Anne Guillaume

Souveraine drôlerie de Sophie Cuvelier

Fine, élégante et légère, 
Sophie est de la poésie en actes et en paroles. 
Le funambule décrit une ligne de partage dans le ciel. 
La grâce funambulesque de Sophie en ce monde partage ceux qui voient 
et ceux qui ne verront jamais rien. 
Souvent si désolée, elle n’a de goût que pour la joie 
et dans sa bienveillance de fée elle est l’occasion de notre gaieté. 
Son métier merveilleux veille sur nos danses, nos détresses et nos étonnements amoureux. 
Il y a dans son art ce qu’il faut de mélancolie, 
de bonheur discret et de rêverie 
pour toucher les enfants,ces critiques austères. 
Ce qu’il y a encore d’enfantin en nous 
est si étrangement ému : l’exquise grâce de ces lignes de formes et de couleurs partage le ciel, 
les paysages, les monuments et les fêtes. 
Ce sont des lignes de vie. > propos recueillis de M-Y.C.



Pour Sophie Cuvelier,
rimbaldienne intuitive, 
au commencement étaient les couleurs, 
alphabet premier de sa première enfance; 
et le papier, réceptacle souverain et subtil, de tous les signes.

Elle peint et teint, froisse et lisse,

découpe et lie, plie et déploie

et voici que ses émotions deviennent une sarabande de guirlandes

des oriflammes hiératiques,

une constellations d'étoiles intimes. 

Rafinement,élégance, danse des sens.
et jubilation intense.propos recueillis de Bouzid.Kouza 



















































Nuit nîmoise
à la reine des guirlandes

Touché au coeur
la révolution comme signe de ralliement
et d'amitié
tu renvoies aux calendes
les vieilles hiérarchies
les codes de la repentance
l'imposture des soumissions
l'abdication des désirs flamboyants

je suis la grenade d'Andalousie
qui explose entre les mains du propriétaire terrien
l'amande douce d'un amour impossible
la trêve des dieux au service de l'humanité
et c'est loin des passions destructrices
que j'ai vu briller tes soleils
dans la nuit d'un atelier terrestre 
où musiques jeunesse et liberté
dispensaient des éclats d'éternité

Je suis l'horizon lisant
l'écriture du vide et des nuages
la pluie et les grandes marées d'équinoxe
la mousson rose et violette
venue d'un temps à naître
l'aubier d'un baiser dans l'arène
le fil d'un récit sans aiguille

Tu fais dériver et flotter les couleurs
sur des morceaux de papiers
des ronds, des rectangles, des triangles
et des carrés
tu crées des visages précieux au gré d'une chanson
des gestes fous des gestes doux
comme des mots
issus d'un souffle profond
ressuscitant les morts des utopies perdues
tu vis au sens fort dans les grandes largeurs
vertigineusement esseulées
dans les tourbillons d'un ciel de Van Gogh.

Le 15 juillet 2014 poème recueilli de André Chenet







































Sophie Cuvelier 
aime investir toutes sortes de lieux
pour en modifier la perception.
Une bodega, une boutique de luxe, un appartement
et pourquoi pas une galerie d'antiquités,
qui est par définition le lieu des rencontres les plus improbables ?
Les temps s'y bousculent et les styles s'y entrechoquent.
Mais si éclectiques soient-ils, 
les objets donnent l'impression de se répondre de manière cohérente. 
De faire partie du même monde.
Sophie Cuvelier se passionne pour ces dialogues improbables.
Et elle aime y apporter sa touche. Ses fragiles lustres en papier de soie interrogent
la puissante matérialité des bustes en marbre.
Ses montages aériens et fébriles narguent 
la perfection transmise au fil des siècles par les artisans d'art de toutes les disciplines.
En somme elle force l'éternel à se contempler dans l'éphémère.
Le solide dans le fluide. Le sérieux dans l'illusoire.
Et le jeu fonctionne à merveille.
Montées en guirlandes ou en lustres volumineux,
ses pastilles de papier jouent la dérision parmi les moulures et les dorures d'époque.
Des myriades de gros points blancs clairsemés de tâches colorées soulignent
la vanité des choses avec humour et courtoisie.
On croirait voir des bulles dans le ciel de Pompéi. Texte de Dann Chétrit





Depuis + de dix ans, 
Sophie Cuvelier réalise des installations discrètes 
ou parfois plus envahissantes : suspendues en baldaquin, 
tendues dans la rue ou entremêlés dans la nature. 
Trois mètres, dix mètres, un kilomètre ou plus, la guirlande n’a pas de limite. 
La recette est complexe et se compose de deux ingrédients essentiels. 
Le premier, la couleur ; 
le second, une indispensable période de vacuité. 
C’est seulement après ce temps de latence que la formule magique opère. 
Pour teindre, sa cuisine lui sert de laboratoire nomade. 
Instinctivement les coloris s’inventent, les papiers sèchent 
et s’éparpillent en une montagne de couleurs, 
chaudes, mates, fraîches, tendres ou froides. 
Suivant son inspiration, Sophie trouve les formes, 
pioche les bonnes nuances et compose le fil d’Ariane. 
> Propos recueillis par Laurence Mamy